Promenons-nous chez les Igorots

N’ayez pas peur, nous ne sommes pas dans une énième bande dessinée de Tintin. Mais alors, que sont les Igorots ? Un plat typiquement philippin ? Une sorte de poisson ? Une spécialité de nouilles chinoises ? Rien de tout ça. Ce terme générique désigne l’ensemble des ethnies peuplant la Cordillère, la partie montagneuse du Nord de Luzon, l’île principale des Philippines. Après vous avoir fait rêver avec les plages de sable fin, le bleu azur de la mer et les poissons, nous allons passer à tout autre chose, tout aussi merveilleux.

Let’s go ! Après une petite correspondance via Manille, nous montons à bord d’un bus de nuit qui nous amènera à Banaue. Un bus, du déjà vu me direz-vous ! Pas tout à fait. Les goûts de nos amis philippins sont…comment dire…kitsch. Dans un bus, dont les rideaux sont en satin rose, les lumières du plafonnier sont vertes, oranges et bleues, et la musique tourne en boucle, l’ambiance est garantie ! Avec tous ces artifices, on ne voit pas le temps passer. A tel point que les deux heures de rab’ offertes passeront inaperçues. Deux heures supplémentaires ?!? Tout simplement à cause de chauffeurs de camions arrêtés sur le bas coté de la route pour dormir, merci pour l’embouteillage ! Ici, le chaos ne nous surprend plus. L’organisation et la rigueur sont des concepts pas encore très répandus. Nous nous ferons cette remarque dans les petits restos où le temps d’attente est parfois interminable pour un plat assez basique, et surtout quand ils oublient de compter des plats dans notre addition, notre porte monnaie ne s’en plaindra pas !

Mais là n’est pas l’essentiel. Arrivés à Banaue à 8h du matin, notre première mission consiste à prendre des renseignements auprès de l’office de tourisme. Notre temps est compté et les sites à visiter sont nombreux, il s’agit de ne pas se rater. Apres une heure de parlotte avec notre conseiller, nous arriverons enfin à déterminer notre itinéraire. Malgré son sens du service, il devait un peu en avoir ras la casquette de nos questions.

Juste le temps de trouver une chambre et de reprendre quelques forces, que déjà nous repartons. Il est 13h30, nous nous rendons à notre point de rendez-vous pour rencontrer notre guide. La façon dont ils les désignent est pour le moins originale. Pour n’avantager aucun guide, ils sont tirés au sort. Le vainqueur du gros lot, nous, c’est JJ (prononcé Jay Jay et non Gigi). A peine le temps de faire connaissance que notre carrosse est déjà avancé, un tricycle (cf. déf. 1). Pour rallier le début de notre visite, nous emprunterons la route « made in Pilipino » : un tronçon goudronné, un tronçon de boue ravagé, un tronçon goudronné, un tronçon de boue, de pierres et de flaques d’eau, et ainsi de suite. L’alternance, originale, rend le trajet marquant (pour les lombaires surtout). Enfin, nous arrivons à destination et à partir de cet instant, l’émerveillement ne cessera jusqu’à notre retour à Manille. Tapez Banaue sur Google, vous atterrirez sur les images des rizières en terrasse, un spectacle fantastique. Imaginez-vous un instant qu’il y’a 2000 ans de cela des hommes, les Ifugao, ont, de leurs mains, construit ces escaliers à flan de montagne pour y cultiver la précieuse céréale. La boue pour seul matériau, ces rizières sont, aujourd’hui encore, parfaitement intactes et fonctionnelles. Les familles, propriétaires des lots, ne se contentent pas de les entretenir pour flatter l’œil des touristes. Le riz, aliment de base ici, y est encore cultivé. Randonner au cœur même de ces terrasses est un bonheur qu’on ne se lassera jamais de goûter pendant notre séjour dans la Cordillère. Notre journée s’achèvera gentiment, avec dans nos têtes ces instants passés à arpenter les rizières et les nombreuses explications de notre guide.

Souhaitant profiter à fond de notre séjour, nous avons « booké » un trip un peu plus costaud, 2 jours et 1 nuit de randonnée autour d’autres rizières en terrasse, celles de Batad (le même exercice sur Google peut être fait). Jeudi 22 mars, 8 heures du matin, départ en jeepney (cf. déf. 2) pour notre rando. Kinakin, rien à voir avec la guerre des étoiles, c’est le point de départ de notre randonnée. Mais c’est aussi une route en chantier, JJ nous a promis qu’elle serait terminée d’ici 5 ans, ayant vu les philippins à l’œuvre, nous parierons plus pour 10 ans…Pour notre part, nous ne voyons pas le temps passer, le plaisir d’être en plein air dans ces forêts combiné aux explications précieuses de notre guide nous maintiennent dans notre bulle. Pourtant, 4 heures se sont déjà consumées lorsque nous arrivons à Cambulo, notre première étape. Après avoir goûté à la tranquillité de ce village traditionnel et ses huttes en toit de nipa, nous repartons sous un soleil omniprésent. Le clou du spectacle, Batad, sera notre prochaine destination. Pour mériter cette récompense, il nous faudra d’abord crapahuter dans les chemins de montagne et les rizières pendant quelques heures, lorsque nous y arrivons nous en prenons plein les mirettes. L’émerveillement est de mise. Le chemin depuis Cambulo était déjà beau, mais lorsqu’on arrive à Batad, cela devient majestueux. Depuis notre promontoire nous contemplons ces terrasses qui figurent parmi les plus profondes du monde. La vue sur ces rizières est magique, elles partent de si haut et s’enfoncent si bas…on ne se lasse pas de les regarder. Avant de regagner notre pension pour y passer la nuit, nous irons aux pieds d’une petite cascade, seul Nico aura le courage d y tremper les fesses !

Dans ce lieu, nous avons occupé notre chambre la plus originale. Montée sur pilotis, notre petite hutte traditionnelle Ifugao avec son toit en nipa et ses lits à même le sol nous aura transporté l’espace d’une nuit à travers la culture philippine. Depuis notre chaumière, nous étions aux premières loges d’un spectacle à la fois magique et mystique ; le brouillard tombant sur les rizières. Définitivement, Les Philippines recèlent des richesses naturelles incroyables. Au petit matin, nous profiterons une dernière fois des délices proposés dans notre auberge. La gentillesse de l’accueil, la quiétude du lieu et la qualité de la cuisine nous laisserons un très agréable souvenir de notre passage. Le temps passe trop vite, il faut boucler la boucle. Sous un soleil de plomb, nous prenons les chemins escarpés que nous fait suivre notre guide pour rejoindre Bagaan, où le tricycle nous attend pour le retour. A la fin de ces quelques jours, nous nous dirons que le hasard doit être notre allié. Notre guide, tiré au sort s’est révélé être un superbe accompagnateur. Ses conseils, ses explications, sa façon d’être, ses chansons, bref, ça a été un vrai plaisir de partager ces moments avec lui.

Pas le temps de traîner, nous devons reprendre un bus afin de rallier Sagada (africa ?) pour la dernière étape marquante de notre séjour. La correspondance avec le bus s’avère chaotique. D’abord, l’attente ; on restera plantés comme 2 poireaux pendant une bonne heure avant qu’il ne daigne passer. Ensuite l’esquive ; apparemment rempli, le bus ne ralentira même pas pour nous embarquer. Pour finir, trouver la solution de rechange; seule une jeepney peut nous sortir de notre mauvaise passe. Après une courte attente, notre sauveur se pointe ! On discute quelques instants, on règle les détails, le deal est conclu. Lucky people ! La jeepney est vide, les places à coté du chauffeur sont libres et il accepte qu’on s’y installe. A plusieurs reprises il s’arrêtera pour nous accorder des « photos time ». Même si le temps à viré à la pluie, nous apprécions chaque instant de ce parcours atypique et unique. Arrivés à Bontoc pour notre correspondance, pas le temps de souffler que déjà nous repartons à bord d’une autre jeepney, violet flashy, remplit à ras bord. Après une heure serrés les uns contre les autres, sous une pluie battante, et sur des routes à la limite du praticable, nous arrivons à Sagada. Ouf.

A ce moment là, une question au centre de nos préoccupations ; va t’il s’arrêter de pleuvoir un jour ? Nous restons un jour complet ici, pas plus, le temps n’a pas le droit de nous jouer des tours. Le chant du coq retentit au petit matin, comme nous, le soleil s’est levé, une bonne étoile veillerait elle sur nous ? Pas de temps à perdre, en rando, hop hop hop. Et quoi de mieux pour commencer la journée que des cercueils suspendus, une sacré curiosité ! Dans ces cercueils sculptés accrochés en hauteur à même la falaise, les défunts sont, selon la légende, plus proche des cieux. En effet, la route semble un peu moins longue… Arrivés à la grotte de Sumaging, on ne sait pas vraiment à quoi s’attendre. Comme dans toute grotte qui se respecte, il fait noir, l’atmosphère est humide et fraîche et les chauves souris s’en donne à cœur joie pour l’ambiance sonore. Une fois le lampion de notre guide allumé, le mystère se lève un peu, ca va être sportif. L’extraordinaire, ca se mérite. C’est une expérience assez unique que nous avons vécu là dessous. Après la salle pleine de guano, notre guide nous demande d’enlever nos chaussures, why ? Pour descendre jusqu’ en bas de la grotte, il est plus facile d’adhérer pieds nus, on s’exécute. Le bougre, il n’avait pas tort. Apres quelques acrobaties dignes d’Indiana Jones, nous sommes tout en bas, c’est merveilleux. La beauté des décors combinée avec le coté aventureux de notre parcours aura fait de cette matinée dans la grotte le point d’orgue de notre randonnée, un grand souvenir !

Notre guide nous avait prévenu, depuis quelques jours le matin il fait beau, l’après midi il pleut, et ça n’a pas loupé. A partir de la, c’est terminé, prenez votre douche, faites vous un thé et allez surfer sur le net, il pleut des seaux d’eau ! Peu importe, nous aurons fait l’essentiel ici. Nous garderons un excellent souvenir de Sagada, son ambiance routarde décontractée, le marché typique, les divers délices qu’on y déniche, les curiosités alentours, bref, ce crochet fut sympa.

Pour couronner le tout, nous finirons par une note culturelle au musée de Bontoc. Entièrement consacré aux Igorots, il nous permet de parfaire nos quelques connaissances sur les ethnies de la région. Dans ce petit musée, nous avons combiné l’utile, en améliorant nos connaissances, à l’agréable, en se délectant des photos, commentaires et de la reconstitution d’un village traditionnel. Maintenant, il est temps de se diriger vers notre destination finale.

Manille ! Avant de rejoindre le Japon, nous restons une petite journée dans la capitale, histoire de. Aux Philippines, le premier effet kiss cool se sont les paysages spectaculaires, le deuxième effet kiss cool, c’est Manille. A propos de cette ville, la légende dit qu’elle fut l’une des plus belles villes d’Asie. Lorsqu’on visite le quartier colonial d’Intramuros, on veut bien le croire. Fondé par les espagnols en 1571, il flotte ici une atmosphère toute particulière, faite des influences hispaniques et philippines, c’est très charmant. On imagine assez bien la douceur de vivre et la beauté des lieux avant l’épisode tragique de la seconde guerre mondiale. Lors de la bataille des Philippines opposant américains et japonais en 41-42, non seulement plus de 150 000 âmes furent emportées mais la ville fut aussi quasiment détruite, figurant parmi les villes les plus durement touchées pendant le conflit. Presqu’entièrement reconstruite, Manille a perdu son charme. La surpopulation, la criminalité et la pauvreté sont les difficultés que la ville essai aujourd’hui de surmonter. Le chemin à parcourir sera encore long, mais la ville y est déjà résolument engagée. En résulte un melting pot où les centres commerciaux clinquant et modernes narguent les enfants vivants dans la plus grande misère, dur.

Nous ne retiendrons que les beaux moments de notre séjour. C’est avec des souvenirs plein la tête que nous quittons Les Philippines vers une nouvelle étape de notre voyage, le Japon.

Def. 1 Tricycle nf, moto à laquelle a été accolée un side car fait main. Pour le passager du side car, le gras de ses fesses sera son unique amortissement, il est donc conseillé de le conserver précieusement lorsqu’ on voyage à bord de cet engin. Par définition, un tricycle peut vous emmener partout, par définition un passager peut aussi supporter le voyage. Mais la réussite dépend surtout du passager.

Def. 2 Jeepney nf, véhicule de transport de troupe datant de la seconde guerre mondiale, pour les plus vieux, entretenus et décorés à la mode philippine et destinés à transporter des passagers dans des conditions de sécurité et de confort minimales. Citation « Les philippins sont aussi doués pour réparer les jeepneys que les cœurs brisés. »

4 réflexions sur “Promenons-nous chez les Igorots

  1. Je vis entre les Phillipines et la Belgique mais mon coeur se trouve dans un petit baranguay dans les montains provinces je suis heureux de vivre la-bas

  2. Nico tu as une façon de décrire vos aventures qui donnent vraiment envie d’y aller… Je retire ce que je disais hier soir, finalement, les Philippines, ça me dirait bien aussi un de ces 4… !

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.